La baisse progressive des coûts d’accès à Internet a favorisé la popularité du sharing en Tunisie. Certes, cette pratique est illégale puisqu’elle dispense ses bénéficiaires de l’obligation de souscrire, à titre individuel, un coûteux abonnement officiel aux différents bouquets de télévision désirés, dont la plupart ne commercialisent d’ailleurs pas leurs services en Tunisie. Elle n’en a pas moins permis au plus grand nombre d’accéder à la culture à un coût raisonnable. Films, documentaires, divertissement grand public... Tout cela est désormais à la portée du citoyen moyen grâce au sharing qui contribue aussi à contrebalancer, un tant soit peu, l’influence néfaste de certaines chaînes satellitaires arabophones véhiculant un message passéiste et réactionnaire tutoyant parfois le fondamentalisme religieux.
Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes... ou
presque. Car l’irruption prochaine de Canal+ dans le paysage audiovisuel
tunisien risque de remettre en cause ce “privilège” (pas très chèrement) acquis
par le téléspectateur tunisien moyen. L’opérateur français compte
commercialiser d’ici la fin de l’année une offre qu’il dit “adaptée au public
tunisien en matière de contenu et de prix.” Canal+ Maghreb, déjà disponible
depuis quelques mois en Algérie et au Maroc avec des fortunes diverses, sera
représenté en Tunisie par Slim Chiboub, l’homme d’affaires tunisien totalement
investi dans le business depuis qu’il a quitté la présidence de l’Espérance
sportive de Tunis.
Canal+ Maghreb qui veut conquérir rapidement le marché
tunisien part déjà avec quelques handicaps. Avec une offre limitée à 36 chaînes
soigneusement choisies pour ne pas heurter la sensibilité culturelle du
tunisien, ce bouquet rachitique doit défier la “concurrence” des centaines de
chaînes reçues quasi gratuitement grâce au sharing. Son prix annoncé, autour de
30D mensuels (50D selon d’autres sources), n’est pas franchement encourageant
surtout qu’on arrive aisément à accéder à l’intégralité du bouquet “original”
de Canal+ France en même temps qu'aux principaux bouquets payants européens et
du Golfe pour à peine le tiers de ce prix.
Mais là où le bât blesse, ce sont les manœuvres occultes
dont serait déjà coupable Canal+ Maghreb pour passer en force dans notre marché
local. Il semblerait selon certains médias tunisiens que le nouveau venu
cherche déjà à saboter le sharing en faisant pression sur les fournisseurs
locaux d’accès à Internet pour qu’ils bloquent les voies qui permettent de
faire transiter le flux d’images vers les téléspectateurs. Accusation à
laquelle le directeur général de Canal+ Maghreb, M. Bruno Thibaudeau, a
“préféré ne pas répondre” en esquissant un sourire évocateur lors d’une récente
rencontre audiovisuelle francophone à Tunis.
Avec les manœuvres de Canal+ pour capter le potentiel économique du marché tunisien, la France achève bien sa politique audiovisuelle en Tunisie. Un mort qui agonisait déjà, que le sharing promettait pourtant de ressusciter. Mais les lois du marché, on le sait, sont impénétrables.
Hédi Ben Smail
Avec les manœuvres de Canal+ pour capter le potentiel économique du marché tunisien, la France achève bien sa politique audiovisuelle en Tunisie. Un mort qui agonisait déjà, que le sharing promettait pourtant de ressusciter. Mais les lois du marché, on le sait, sont impénétrables.
Hédi Ben Smail
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